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Nouvelles de Pacôme Thiellement : vidéos, livres, interventions, rendez-vous.

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13 juil. · 3 mn à lire
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Faites le Mal mais faites-le bien

Où l'auteur de la niouzeletteur, qui se pensait quitte jusqu'à la rentrée, envoie in-extremis avant de partir quelques derniers liens dont un morceau magnifique de Jessika Kenney et Eyvind Kang.



Je pensais attendre la rentrée pour vous écrire, mais vient d’être mise en ligne une vidéo qui tombe à pic dans notre pays épargné de justesse et suspendu, et que je veux vous transmettre avant de vous fiche la paix. 

https://www.youtube.com/watch?v=SZolsLmEN5o

C’est un morceau joué par Jessika Kenney et Eyvind Kang devant le mur des Fédérés au Père-Lachaise, en juin 2022. Jessika Kenney et Eyvind Kang, Eyvind Kang et Jessika Kenney : deux musiciens parmi les plus extraordinaires qui soient. Deux musiciens poètes, prophètes et philosophes que j’aime et écoute quasi-quotidiennement depuis vingt ans (aussi nécessaires pour moi, dans ma vie de tous les jours, que Prince, Zappa, les Beatles, Monk, Mingus, Coltrane ou Otis Redding) portés par une inspiration qui traverse toutes les questions de notre temps avec la puissance destructrice et reconstructrice de l’infini.

Eyvind et Jessika ont été filmés par Vincent Moon. Leur musique, d’une beauté sans pareille, me fait penser à la musique des sphères décrite par Shakespeare dans la tirade célèbre du Marchand de Venise : 

“Assieds-toi, Jessica. Vois comme le parquet du ciel est partout incrusté de disques d’or lumineux. De tous ces globules que tu contemples, il n’est pas jusqu’au plus petit qui, dans son mouvement, ne chante comme un ange, en perpétuel accord avec les chérubins aux jeunes yeux !”

Alors que je déjeunais avec eux, Jessika et Eyvind m’ont proposé de lire un poème avant leur morceau, No Sound, qu’ils avaient joué la veille en concert à Montreuil et qui m’avait déjà conséquemment marqué. On a choisi ensemble le poème de Louise Michel qui apparaît en ouverture de son livre La Commune :

Quand la foule aujourd’hui muette,
Comme l’Océan grondera,
Qu’à mourir elle sera prête,
La Commune se lèvera.


Nous reviendrons foule sans nombre,
Nous viendrons par tous les chemins,
Spectres vengeurs sortant de l’ombre,
Nous viendrons nous serrant les mains.


La mort portera la bannière ;
Le drapeau noir crêpe de sang ;
Et pourpre fleurira la terre,
Libre sous le ciel flamboyant.


https://www.youtube.com/watch?v=SZolsLmEN5o

Ce morceau qu’ils jouent, No Sound, est tiré de leur dernier album à ce jour, Azure. Ils avaient joué l’entièreté du disque la veille à Montreuil, cela m’avait ému et transporté et fait trembler la peau et vibrer les os et je suis infiniment heureux que ce disque existe. Azure. Si vous ne connaissez pas Azure, écoutez-le. Réécoutez-le. Achetez-le. Offrez-le. Comme ces disques extraordinaires publiés par Eyvind Kang que sont Theater of Mineral Nades (1998), Virginal Co Ordinates (2004), The Yelm Sessions (2007), The Narrow Garden (2012), Chirality (2019), comme le disque de Jessika Kenney Atria (2015), ce n’est pas seulement du grand art, c’est de la médecine.

https://ideologicorgan.bandcamp.com/album/azure

Je pensais à la première fois que je les ai vus en concert, à L’Aéronef de Lille, en octobre 2012, lors de la résidence de Secret Chiefs 3. Ils avaient joué avec Trey Spruance et une harpiste un morceau sur des gammes très anciennes et qui semblait revenir de la nuit des temps ou des origines du monde. Un morceau qui a peut-être été joué par les pseudo-Sabéens de Harran en exil alors que leur cité était détruite. Un morceau que j’avais l’impression de connaître depuis toujours et que je n’ai jamais réentendu depuis.

Je pensais également à ce soir magique, en novembre 2014, au Nadir de Bourges (oui, le Nadir, comme dans Céline et Julie…), où ils se produisirent sur scène avec les soeurs Park et cette incroyable variation autour du poème Faites le Mal d’Antonin Artaud. Alors, ils avaient demandé à Hermine Karagheuz - aujourd’hui disparue - de lire le poème d’Artaud, en ouverture. Thomas Bertay et Antoine Mocquet étaient là et ils avaient filmé. Hermine avait lu. Ils avaient joué. La salle était sous le choc. La vidéo est disponible ici :

https://vimeo.com/groups/667353/videos/126638805

Hermine me manque. 


Post-scriptum.
Je me rends compte, alors que je me rends tout juste sur YouTube, que vient d’être mis en ligne sur la deuxième chaîne de Blast le long react consacré à l’épisode de L’Empire n’a jamais pris fin consacré aux Cathares. On l’avait enregistré en direct sur Twitch il y a deux mois, avec Ameyes Aït-Ouffela (depuis Lyon), Baptiste Veilhan et Mathias Enthoven.

Attention, il fait 4h30 ! Mais si vous avez envie de nous entendre parler de L’Empire n’a jamais pris fin, alors vous allez nous entendre parler de L’Empire n’a jamais pris fin :

https://www.youtube.com/watch?v=kAhWmrsZQXQ&t=4603s

Et je m’aperçois également que, sur la chaîne du fan de Mouffette, on trouve aussi le génial react de la géniale streameuse Mouffette sur le dernier épisode de L’Empire n’a jamais pris fin : Jeanne la gauchiste.

https://www.youtube.com/watch?v=-9w6I8dHJGM

Avant de partir, je vous rappelle (si vous ne les avez pas encore vus) mes dernières collaborations avec Blast à ce jour.

Le dernier épisode de La Fin du Film, consacré à Melancholia de Lars Von Trier, réalisé par Thomas Bertay (dernier = dernier, ultime, fin de la série ; je le répète parce qu’on m’a posé la question, oui c’est la fin de la série). La réalisation de Thomas est totalement dingue et sublimissime dans cet épisode - plus extrême, virtuose, psychédélique et inattendue que jamais.

https://www.youtube.com/watch?v=QonpAL18ydE&t=155s

Et le dernier épisode de la première saison de L’Empire n’a jamais pris fin, consacré à Jeanne d’Arc, réalisé par mes chers et géniaux Ameyes Aït-Ouffela et Mathias Enthoven (dernier épisode de la première saison = pas dernier, on revient en octobre pour une deuxième saison). Et pour les deux programmes, des musiques divines de Baptiste Veilhan, et des vignettes magiques de Morgane Sabouret.

https://www.youtube.com/watch?v=3qLSAV_QIaU&t=1130s

Voilà, voilà.
Bonnes vacances (si possible) les amis.
On se retrouve à la rentrée.

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